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Rétrospectives 2023

Evolution macroéconomique

Le retour de l’inflation, conséquence directe de la pandémie de Covid, renforcé par la guerre entre la Russie et l’Ukraine, a amené les banques centrales, en Europe et aux Etats-Unis, à sortir de leur politique de taux zéro qu’elles menaient depuis de nombreuses années. Depuis 2022, nous avons assisté à un net durcissement de la politique monétaire avec onze relèvements de taux aux Etats-Unis et dix hausses en zone euro. Les taux ont atteint des niveaux que l’on n’avait plus connus depuis le début des années 2000 en zone euro et depuis le milieu des années 2000 aux Etats-Unis.

Fin 2022, dans un contexte d’inflation très élevée et de fort  resserrement des politiques monétaires, les prévisionnistes s’interrogeaient sur la résistance de la croissance et sur le probable basculement des économies occidentales en récession.

Un an plus tard, certaines évolutions se sont révélées conformes aux attentes comme par exemple l’évolution baissière de l’inflation, mais, d’autres évolutions ont contredit les anticipations de la majorité des analystes et des marchés pour 2023.

Plusieurs surprises sont à retenir pour l’année qui vient de s’écouler :

  • La résilience des économies et principalement de l’économie américaine.
  • La croissance américaine a surpris par sa résilience dans un contexte de hausses de taux et de durcissement des conditions d’accès au crédit.
  • La vigueur du marché du travail aux Etats-Unis et en zone euro.
  • Les politiques monétaires plus restrictives qu’anticipées par les marchés fin 2022.Si l’inflation a baissé en 2023, elle est restée au-dessus de la cible fixée par les banquiers centraux et a obligé ces derniers à relever davantage les taux directeurs. Néanmoins, on peut souligner en toute fin d’année le changement de discours de la Réserve Fédérale et de certains membres de la Banque Centrale Européenne.
  • L’appétit des investisseurs pour les actifs risqués qui ont été rassurés par la bonne tenue des économies et l’orientation de l’inflation.  

Une inflation en baisse

Comme attendu, on a observé une modération de l’inflation à la fois dans la zone euro et aux Etats-Unis au cours de l’année 2023. Cette baisse importante s’explique tout d’abord par des effets de base favorables en lien avec la baisse des prix de l’énergie. La baisse du prix des services a également contribué à la tendance.

Aux Etats-Unis, le pic de l’inflation a été atteint mi-2022 à 9,1% et, en zone euro, en octobre 2022 à 10,6%. Depuis fin 2022, les prix à la consommation ont diminué de 6,5% à 3,1% en novembre 2023 aux Etats-Unis tandis qu’en zone euro, l’indice est passé de 9,2% à 2,9% à la fin décembre.

Nous constatons également, tant sur l’inflation totale que sur l’inflation sous-jacente, que la dispersion entre les différents Etats de la zone euro se réduit, même si elle reste encore supérieure à la moyenne observée sur l’historique récent.

La tendance concernant l’inflation sous-jacente, qui exclut les éléments les plus volatils tels que l’alimentation et l’énergie, a également été à la baisse en 2023, mais, son apparition a nécessité davantage de temps en zone euro, où l’inflation de base a entamé une diminution plus marquée à partir du mois de septembre. De plus, le reflux de l’inflation sous-jacente a été plus lent que l’inflation totale en zone euro comme outre-Atlantique. En fin d’année, l’inflation Core s’établissait aux Etats-Unis à 4,0% et à 3,4% en zone euro.

Inflation Zone euro en glissement annuel
Inflation US en glissement annuel

Malgré cette tendance favorable, la problématique inflationniste n’est pas résolue. L’inflation reste supérieure à l’objectif de +2,0% fixé par la Banque Centrale Européenne et par la Réserve Fédérale. Le risque est d’avoir une inflation à des niveaux plus élevés que ceux que nous avons connus pendant de nombreuses années en raison de changements structurels (enjeux environnementaux, relocalisation des industries, …) dans les économies.

Enfin, la Chine n’a pas été confrontée à la problématique inflationniste rencontrée en Europe et aux Etats-Unis en raison de l’absence de choc lié aux prix de l’énergie mais également du fait de la morosité de la demande. L’inflation qui était de 2,0% en 2022 devrait s’établir à +0,4% en 2023.

La politique des banques centrales

Les Banques centrales ont été à la recherche d’un équilibre entre la lutte contre l’inflation, la préservation de l’activité économique et la stabilité financière mise en péril par la hausse des taux.

La baisse tendancielle de l’inflation en 2023 n’a pas remis en cause les politiques restrictives des banques centrales qui ont clairement fait le choix de privilégier la lutte contre la hausse des prix. Elles ont été confortées dans leurs décisions par les tensions sur le marché du travail et par les hausses de salaires.

Si elles sont restées fermes dans cette lutte via les instruments traditionnels de politique monétaire, cela ne les a pas empêchées d’intervenir ponctuellement via des instruments dédiés afin d’assurer la stabilité du système financier. En effet, la rapide hausse des taux d’intérêts aux Etats-Unis, a provoqué des faillites dans plusieurs banques régionales américaines (Silicon Valley Bank, Signature Bank, First Republic Bank) et a amené la Fed à mettre en place un nouveau programme de mise à disposition de liquidités (Bank Term Funding Program) permettant aux banques en difficultés d’obtenir des prêts courts termes en échange de collatéral à leur valeur faciale. En Zone euro, les déboires de Crédit Suisse et son rachat par UBS a fait craindre un moment une possible contagion et a obligé la Banque Centrale Européenne à rappeler qu’elle disposait des outils pour préserver la stabilité du système bancaire.

Au final, la Réserve Fédérale et la Banque Centrale Européenne ont donc poursuivi les hausses de taux. Depuis mars 2022, la Fed a effectué 11 hausses de taux, le taux directeur passant de [0,00% - 0,25%] à [5,25% - 5,50%]. En 2023, elle a procédé à 4 hausses de 25 pb.

La Banque Centrale Européenne a, quant à elle, relevé ses taux à 10 reprises depuis juillet 2022 de 0,00% à 4,50%. Cette année, nous avons assisté à 2 hausses de 50 pb et 4 hausses de 25 pb.

Taux directeur de la BCE
Taux directeur de la FED

On constate que les  conséquences de ces hausses de taux sont de plus en plus visibles sur l’activité économique en particulier en zone euro. Malgré cela, lors de la dernière réunion de politique monétaire, la Banque Centrale Européenne a refusé de baisser sa garde et a affirmé sa volonté de maintenir ses taux élevés pendant une période suffisante pour s’assurer du retour de l’inflation vers sa cible. De son côté, la Réserve Fédérale, se montre plus confiante dans la trajectoire de l’inflation et évoque désormais le sujet d’un assouplissement monétaire. Ainsi, la médiane des prévisions des membres du FOMC signale une baisse des taux de 75 pb en 2024 en lien avec le recul des prix. Ces déclarations ont renforcé les anticipations des marchés financiers d’une baisse des taux directeurs en 2024.

Une activité économique qui résiste mais de façon inégale selon les pays

Aux Etats-Unis, la croissance américaine a fait preuve d’une résistance inattendue dans un environnement négatif de hausse des taux d’intérêt et de durcissement des conditions de crédit. Cette situation s’explique par :

Le soutien de la politique budgétaire.

La très bonne tenue du marché du travail avec une offre d’emploi nettement supérieure à la moyenne long terme et un taux de chômage qui s’est stabilisé à de bas niveaux.

L’épargne accumulée par les ménages qui a également contribué à cette situation et leur a permis de continuer à consommer.

Au 1er trimestre 2023, la croissance est ressortie à 2,2% puis à 2,1% au 2ème trimestre en glissement trimestriel annualisé en raison de la résistance de la consommation des ménages et de l’investissement des entreprises.

La croissance a même accéléré au T3 à 4,9% en rythme annualisé par rapport au T2 soutenue principalement par la vigueur de la consommation des ménages.

Néanmoins, de nombreux indicateurs pointent vers un affaiblissement de la croissance en fin d‘année 2023. On retiendra notamment le tassement des créations d’emplois, la diminution des pressions salariales et le risque d’une baisse de la consommation des ménages en lien avec le fort repli de l’épargne excédentaire qui au plus haut a culminé à 2 300 milliards de dollars fin 2021 et se situe désormais à 500 milliards de dollars.

Enfin, l’enquête ISM du climat des affaires dans l’industrie reste mal orientée, proche de ses plus bas des dernières années. (47,4).

En zone euro, la croissance a ralenti mais la récession que de nombreux analystes anticipaient fin 2022 a été évitée.

Ce coup de frein de l’activité européenne s’explique par la dépendance de la zone au commerce extérieur et par la faible dynamique du commerce mondial. Ainsi, l’Allemagne a été particulièrement impactée, d’une part du fait de sa perte de compétitivité liée à la hausse du coût de l’énergie, et d’autre part, par le ralentissement de ses marchés d’exportation au  premier rang desquels la Chine.

Sur l’année, le PIB de la zone euro a été légèrement positif au T1 (+0,1%) et au T2 (+0,1%) puis s’est contracté de 0,1% au T3 (en glissement trimestriel) en raison de la contribution négative des stocks. Malgré ce léger repli au 3ème trimestre, la poursuite de la bonne orientation du marché du travail et des salaires, le repli de l’inflation et le redressement de la demande intérieure, atone au 1er semestre, en raison du rebond de la consommation privée, constituent des signaux positifs pour l’économie européenne.

Néanmoins, les derniers indicateurs issus des enquêtes de confiance pointent une très grande faiblesse, voire une contraction de l’activité au quatrième trimestre 2023. L’enquête PMI composite (47,6) de décembre continue de signaler une activité en contraction au dernier trimestre dans le secteur manufacturier (44,4) et dans les services (48,8). Les enquêtes de la Commission européenne attestent d’une confiance toujours morose des consommateurs.

En Chine, l’année 2023 a été difficile et le pays peine à se relever de l’épidémie de Covid-19. Après avoir levé les restrictions et abandonné la politique du zéro-covid, la croissance a rebondi en début d’année mais cette dynamique s’est très vite essoufflée.

Le pays s’est retrouvé face au ralentissement de la demande mondiale qui a pesé sur les exportations et face à une demande domestique qui n’a pas suffisamment pris le relais, comme en atteste la faiblesse de l’inflation. La confiance des investisseurs et des ménages s’est dégradée en raison notamment de la grave crise que traverse le secteur immobilier chinois.

A partir de l’été, le gouvernement a pris des mesures de soutien en assouplissant la politique d’accès à l’achat de biens immobiliers et la Banque Centrale de Chine a procédé à des baisses de taux et à des injections de liquidités dans le système financier.

Ces mesures ont probablement permis un regain de dynamisme au 3ème trimestre  et l’objectif de croissance de 5,0% fixé par le gouvernement en 2023 sera atteint.

Dans un contexte de risque accru d’une croissance structurellement plus faible que par le passé, de persistance de la crise immobilière, et de la hausse de l’endettement, l’agence de notation Moody’s a abaissé début décembre la perspective de la notation souveraine du pays de stable à négative.

Evolution des marchés financiers

Les marchés obligataires

Après une très mauvaise année 2022, les marchés obligataires affichent de bonnes performances en 2023. Comme en 2022, la volatilité de marché des taux souverains a été importante.

Jusqu’au mois d’octobre, on a assisté à une tendance globalement haussière des rendements souverains sous l’effet de la résilience de l’économie américaine et des craintes d’une politique monétaire durablement restrictive. En Zone euro, bien que l’activité ait été moins bien orientée, les taux ont monté en raison de la politique de la Banque Centrale Européenne et de la corrélation au marché américain. Cette tendance s’est vérifiée sur les maturités courtes et longues.

A partir de la mi-octobre, nous avons assisté à un retournement des taux à la baisse à la suite d’indicateurs économiques en retrait, de la diminution progressive de l’inflation, d’une inflexion dans la communication des banquiers centraux qui a renforcé les anticipations de baisse des taux des investisseurs en 2024 et, aux Etats-Unis, de facteurs techniques avec des émissions du Trésor inférieures aux attentes.

Sur l’année, en zone euro, les échéances longues ont surperformé les maturités courtes plus sensibles aux évolutions des anticipations de politique monétaire. Ainsi, le taux allemand à 10 ans a cédé 55 pb et atteint 2,02% en fin d’année tandis que le taux 2 ans a vu son rendement diminué de 2,76% à 2,40%. Parmi les 4 principaux Etats de la zone euro, l’Italie signe la meilleure performance et voit le rendement de l’emprunt à 10 ans passer de 4,72% à 3,70% soutenu notamment par la confirmation des notations attribuées par les agences durant l’automne.  

Aux Etats-Unis, le T-Note 10 ans a fait du surplace en 2023 et termine l’année à 3,88% soit le même niveau que fin 2022. Néanmoins, sur les 12 mois, sa volatilité a été marquée et il a touché près de 5,0% le 19 octobre, des niveaux que nous n’avions pas connus depuis 16 ans. Le taux 2 ans a enregistré un rallye sur les derniers mois de l’année avec l’assouplissement dans le discours de la Réserve Fédérale et est passé de 4,43% à 4,25%.

Sur les marges de crédit, mis à part des tensions liées à la hausse de l’aversion pour le risque, en particulier lors des faillites de banques régionales aux Etats-Unis en mars, la tendance a été baissière.

Les marchés du crédit ont profité de la résilience des économies, de la baisse de l’inflation, et en fin d’année du renforcement des anticipations de baisse des taux directeurs.

Les spreads de crédit ont terminé l’année 2023 à leur plus bas niveau tant sur les signatures investment grade (supérieure ou égale à BBB-) que sur les notations Xover au sein desquelles nous retrouvons des émetteurs dont la notation est inférieure à BBB-.  

Les obligations d’entreprises ont bénéficié de la baisse des marges de crédit ainsi que de la baisse des taux swaps. Dans ce contexte, les performances annuelles sont très bonnes et supérieures aux obligations souveraines. L’indice iBoxx € corporate 3-5 ans enregistre une performance de 7,7% tandis que son homologue sur les maturités 7-10 ans affiche une progression de près de 11,0%.

Les marchés actions

Après une très mauvaise année 2022, et face à de nombreuses craintes, beaucoup d’analystes attendaient une année 2023 difficile pour les actions. L’inflation élevée, les hausses de taux directeurs et les craintes de récession étaient autant de sources d’inquiétudes pour la performance des marchés actions. Un an plus tard, la plupart des grands indices actions ont enregistrés des performances positives car la récession a été évitée, la désinflation est en marche et les marges des entreprises ont été préservées. L’assouplissement du discours des banquiers centraux au dernier trimestre a particulièrement profité aux actions.

Les indices généralistes aux Etats-Unis ont surperformé ceux de la zone euro. Ainsi, le S&P 500 s’est valorisé de 24,2% et le DJ Euro Stoxx 50 de 19,2%. Ces progressions s’expliquent aux Etats-Unis par un effet d’expansion des multiples de valorisation alors que les bénéfices des entreprises ont été stables sur l’année. En zone euro, la progression des cours provient d’un effet valorisation et d’une légère croissance des bénéfices des entreprises.  

La performance des marchés émergents a été plus modeste notamment du fait du recul des actions chinoises ; le Hang Seng a baissé de 13,8% en 2023.

Sectoriellement, la meilleure tenue des économies a été propice à la surperformance des valeurs cycliques par rapport aux titres défensifs. Au niveau global, les valeurs cycliques (MSCI cyclical = 33,4%)  ont retrouvé des couleurs par rapport à leur mauvaise performance de 2022 et ont nettement surperformé les valeurs défensives (MSCI Defensive = 2,7%). En France, le CAC 40 a été tiré majoritairement par les valeurs cycliques.  

Aux Etats-Unis et en zone euro, le secteur technologique a enregistré les meilleures performances. Le MSCI EMU technologie a grimpé de 34,2% tandis que le Nasdaq composite a réalisé un bond de 43,4%.  

En zone euro, l’industrie (MSCI EMU industrie = 23,2%) a profité de l’optimisme quant au prolongement du cycle économique mondial et le secteur de la finance (MSCI EMU Finance = 16,7%) s’est très bien comporté grâce à des taux d’intérêts en territoire largement positif.

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